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L'institution au contact de la "plateforme numérique"

Séminaire d'axes

Le 16 mai 2024

Eugène Favier Baron, doctorant en philosophie, UGA

La fameuse "transition numérique" des institutions n'est pas une transcription qui reproduirait numériquement et à l'identique les institutions dont l'État en premier chef. Derrière l'apparente innocence de la numérisation, gît un véritable virage paradigmatique qui ébranle la conception traditionnelle de l'institution. Il n'est pas aisé de repérer ces changements car ils s'opèrent moins par le biais d'un projet finalisé ou d'un dessein idéologique que de manière incrémentale, par le biais de la performativité des technologies numériques et des transformations scripturales ou interactionnelles qu'elles induisent.
De cet espace numérique a émergé le pendant numérique de l'institution moderne, la "plateforme digitale", dont les prérogatives encore floues se dessinent au fil de l'action, par le biais d'un pragmatisme technologique qui fait office de loi ("Les plateformes se définissent par ce qu'elles font" R. Bratton, 2016). Les plateformes semblent emprunter des caractéristiques à des formes d'acteurs à la fois institutionnelles et privées, sans pour autant se réduire à l'une ou l'autre de ces catégories, il est donc nécessaire de repenser aussi bien les normativités politiques que techniques à partir des singularités de cette hybridation.
Parallèlement à l'interférence des institutions traditionnelles qui tentent de recouvrer une souveraineté au sein de cet espace numérique dominé par les plateformes, se profile à la fois des rencontres entre l'écosystème des plateformes et des formes institutionnelles plus classiques de manière souvent imprévisible, comme en témoigne le concept "d'Etat-plateforme", en même temps que des rapports de force. En effet, si les plateformes doivent se conformer à un cadre juridique extrinsèque, elles bénéficient d'une grande marge de manœuvre pour gouverner leurs espaces, qui contrecarrent ou au moins constituent un système de régulation autonome et parallèle aux structures juridiques. Cela induit enfin une recomposition numérique du sujet tel qu'il a été érigé par le libéralisme aussi bien du point de vue de l'économie classique (homo-oeconomicus) que du droit et de la philosophie (contrat social) par le biais de la « gouvernementalité algorithmique » (A. Rouvroy, T. Berns, 2013).

 

Date

Le 16 mai 2024
Complément date

10h - 12h

Localisation

Complément lieu

UFR ARSH

Salle B1

Publié le 12 avril 2024

Mis à jour le 25 novembre 2024