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Soutenance
On January 24, 2026
dirigée par Monsieur Thierry Ménissier (UGA) & Thomas Berns (Université Libres de Bruxelles)
Les plateformes numériques se retrouvent dans une position ambiguë ; celle d'assumer une gouvernance de fait d'un espace Internet dont la caractéristique originelle fut principalement son absence de gouvernance. La forme disséminée et décentralisée de son réseau lui vaut effectivement la prétention de déjouer tout phénomène de concentration. En cela, la plateforme numérique résulte d'une contradiction majeure. Elle semble épouser la forme horizontale, décentralisée et désintermédiée d'Internet tout en se découvrant progressivement une vocation monopolistique et ubiquitaire. Ce travail a pour ambition d'élucider ce paradoxe en commençant par l'examen des caractéristiques qui distinguent la plateforme en tant qu'objet de gouvernance, de l'institution ou de l'entreprise, et qui hérite en cela d'une certain leg destituant qu'on associe à l'imaginaire du « web 2.0 ». De fait, la plateforme se démarque par le contrôle d'une logistique sémiotique, d'une économie de la connaissance et de l'attention, d'une maîtrise d'actifs intangibles qui font signe vers un rendement immatériel de la plateforme. Cette dernière se distingue également par sa forme organisationnelle « participative » en ce qu'elle repose sur un réseau d'acteurs périphériques qu'elle agglomère sous forme de plus value.
Nous avons retenu deux rationalités structurantes eu égard la gouvernance de la plateforme : un réseau de technologies de l'information et de la communication de nature cybernétique supervisé par une « gouvernementalité algorithmique » (Berns & Rouvroy, 2013). Les flux logistiques et informationnels de la plateforme font exister les éléments par leur vocation signalétique et métrique – les « métadonnées » qui conditionnent leur maniement – et offrent en cela une conception quantitative de l'information, à la manière des cybernéticiens. La plateforme réalise un espace d'interconnexion des flux qui place la relation, ou plutôt, la corrélation identifiée par voie d'algorithmes, au centre de son ontologie. Nous voulions déduire de ce décentrement de la substance au profit de la relation, des perspectives d'émancipation post-dualistes et post-modernes mais un examen plus approfondi de ces caractéristiques les révèlent pour ce qu'elles sont : le produit d'un régime de vérité en lieu et place de caractéristiques réellement dé-hiérarchisantes et désanthropocentrées. Certes un tel régime produit des effets performatifs, mais loin de mener à un espace désintermédiée, non seulement la plateforme ne cesse de multiplier les médiations complexes, de produire de nouvelles normes incrémentales que nous tentons d'extirper de leur opacité technique, mais elles se voient également confrontés à des rationalités étatiques, institutionnelles ou militantes qu'elles absorbent de sorte à assimiler ces antagonismes et produire de nouvelles rationalités cumulatives.
Les plateformes imposent des logiques de gouvernance, de modération, de règles d'accès et de circulation de l'information par voie de protocoles dans un espace réputé peer-to-peer, c'est-à-dire où un utilisateur peut être à la fois client et serveur – utilisant comme dispensant des ressources au sein d'un réseau rendu résilient par son absence de centre, qui ne repose pas sur un noeud central. Les plateformes figent en métrique, logistique, interfaces et architectures propriétaires un processus de communication horizontal (scores de visibilité, « tendances (trend) », graphes de connexions, etc.), le transformant en forme rigide qui capture et stabilise les interactions d'utilisateurs. La plateforme mue un espace qui se veut horizontal en un régime opaque à la hiérarchie naturalisée dont la dimension construite se voit invisibilisée par un design opacifiant. Ce faisant, la normativité implicite d'un algorithme apparaît comme structure objective. Ce à quoi nous tâchons d'y opposer l'idée de processus, comme rappelle que cette forme est toujours produite, reproduite et donc modifiable par des pratiques et des choix.
Date
9h
Localisation
à venir
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